« Tu t’éclates ? » Régulièrement, cette question revient comme un refrain. Que certains me posent. Au sens populaire : « se donner intensément à quelque chose en y prenant un grand plaisir ; se défouler, se défoncer : s’éclater en dansant. »
Cela me remémore le temps des boîtes que je ne fréquente plus depuis bien longtemps. Je crois que je n’ai pas du tout envie de m’éclater. Que je ne cherche pas non plus à m’éclater. Au sens propre, s’éclater signifie « se rompre avec violence et généralement avec bruit, en projetant des fragments ou en s’ouvrant. » Désarticulation ? Démembrement ? Aïe aïe aïe, quelle explosion. Danger. Attention à la chute. Un chemin déjà fréquenté, un désastre assuré.
Peut-être nous sommes-nous d’ailleurs suffisamment éclatés ? Quand on regarde l’état de notre planète, nous l’avons bien éclatée, n’est-ce pas ? Non, je ne m’éclate pas : je cherche plutôt à me rassembler.
Sur scène aussi, je me sens au croisement de tout ce que je suis, à la fois intérieurement et extérieurement. Avec avec vous qui êtes là. Sur scène, je me rassemble et je rassemble. Dans ce rassemblement, je ressens l’unité, malgré nos vies éclatées. Dans ce rassemblement, mes mots viennent recoudre les vies déchirées, les « moi “éclatés de celles et ceux qui viennent m’écouter. Oui, il y a sans doute urgence à se rassembler, à nous rassembler individuellement et collectivement.
Non, je ne m’éclate pas : je cherche chaque jour l’unité. Un chemin difficile, l’unité. Entre vie familiale, vie personnelle, vie de couple, vie professionnelle, vie amicale et sociale. Cela nécessite chaque jour de m’enraciner dans ma terre pour éviter justement de m’éclater. Non, je ne m’éclate pas. Je ressens du plaisir, de la joie, de l’enthousiasme, de l’amour, de la gratitude, c’est certain. Pas tous les jours. Souvenez-vous, derrière la lumière, il y a toujours l’ombre. Et après l’été, l’automne avec ses feuilles mortes vient m’habiter.
Puissent tous les artistes devenir des serviteurs d’autre chose que d’eux-mêmes et recevoir au centuple ce qu’ils choisissent de donner pour la joie de leurs frères humains.
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